Pourquoi le journalisme?

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J'AI 8 ANS. Je viens de finir le roman de Pierre Gamarra, Six Colonnes à la Une. Au fil de ses pages, j’ai dû m’identifier avec une journaliste critique d’art, qui court les expos armée de son micro. Exit les rêves de devenir maîtresse, archéologue, docteur ou pompier...  d’un  coup d’un seul, la vocation m’échoit : quand je serai grande, je serai journaliste.

-          J'AI 12 ANS. Devant ce chef d’œuvre du cinéma qu’est Héros Malgré Lui, je tombe en pamoison face à l’image de cette journaliste aux dents longues, sur le toit d’un immeuble de 43 étages, en train d’interviewer dans un hélico un mec (Dustin Hoffman) prêt à se jeter dans le  vide : dans 20 ans, « elle », c’est « moi ».

-        J'AI 14 ANS. Je visite Le Populaire du Centre, le canard quotidien de Limoges. Rotatives, odeurs d’encre, clapotis des machines à écrire, cigarettes jamais éteintes, tensions d’une rédaction...

-          J'AI 15 ANS. Je veux remplacer Claire Chazal, pour me rappeler toute sa vie au bon souvenir d’un amoureux, qui semble manifestement plus accroc à sa télé qu’à moi-même.  

-          J'AI 18 ANS. Pas super fan d’actu. Super férue de littérature. Qu’à cela ne tienne, je serai critique littéraire...

-          Hmmm. 20 ANS. Quoique. Je n’aime pas la solitude. Je suis éperdue de musique, de soirées, de festivals... Finalement, je serai journaliste musicale !

-        J'AI 23 ANS. Premier stage, à Libération, rubrique cinéma. Tout confirme ma vocation. Le rush du Quotidien, la quête du scoop, de l’événement (et il y en a eu un beau : l’affaire Cantat/Trintignant), l’ébullition de l’Open Space. Le virus m’a piquée de façon concrète.

-      J'AI 25 ANS. Ecole de journalisme. Traitement de sujets généralistes : qu’il est doux de questionner le monde.

-          J'AI 30 ANS. 5 ans que j’officie dans ce métier, avec ses hauts, ses bas, mais toujours la même passion, la même envie. Regarder le monde, écouter les gens, mener l’enquête, les interroger, apprendre toujours, se passionner pour un sujet dont on ne savait même pas, la veille, qu’il existait, approcher la réalité par la musique ou d’autres biais, d’autres angles, rendre compte, transmettre, partager, se dire qu’on participe, un peu, à une meilleur citoyenneté, à un mieux-vivre ensemble, peiner à refermer la porte, être sans cesse sur le qui-vive, kiffer.